CFP2023
D12 – Dr You et Mister ChatGPT : l’intelligence artificielle remplacera-t-elle un jour les médecins pour la prise en charge des addictions aux urgences ?

Modérateur : Florence VORSPAN – Paris
Débatteurs : Julien CABÉ – Clermont-Ferrand et Nicolas CABÉ – Caen

Dans ce débat autour de l’Intelligence Artificielle deux frères s’opposent pour un combat fraternel et nuancé. Deux frères jumeaux pour parler des possibilités de clonage numérique, de quoi nous faire perdre le sens du réel et nos repères entre les pour et les contre. Mais ne nous y trompons pas ces deux Dr Cabé sauront nous montrer le chemin pour mieux cerner l’intérêt et les risques de Mister ChatGPT en santé.

Urgence, danger !

De l’Intelligence Artificielle (IA) en urgence pour les urgences, rêve ou cauchemar ? Alors que les besoins sont évidents du fait de la complexité des consultations aux urgences, des problématiques multiples et des situations de sevrage parfois inopinées, est-ce que You ou ChatGPT pourraient aider à apporter des réponses précoces, rapides et personnalisées ? Si l’OMS en 2021 soulignait l’intérêt fort de l’utilisation de l’Intelligence Artificielle en santé, deux ans plus tard elle appelait à la prudence quant à son utilisation. À l’image des mots ressortis dans le questionnaire interactif proposé par nos deux conférenciers, est-ce que l’Intelligence Artificielle serait au final comparable à Skynet et au jugement dernier ? Et faudrait-il lui dire, à la manière de Terminator, « Hasta la Vista, Baby ! ».

Si l’Intelligence Artificielle est vue comme l’adversaire, il nous est rappelé que deux types d’IA existent : l’IA forte capable de raisonner comme un humain et l’IA faible, destinée à aider l’humain. De ces deux types d’IAs, deux approches coexistent, l’approche symbolique appliquant des règles logiques de déduction et de hiérarchisation et l’approche numérique cherchant des régularités pour pouvoir extraire des connaissances sur de grosses bases de données. Des systèmes experts datant des années 80 au Deep Learning reconstituant le fonctionnement cérébral, nous connaissons désormais mieux l’ennemi.

Biais cognitifs artificiels

Et si le point faible de l’ennemi était celui que nous lui avons nous-même inculqué ? L’humain est sensible aux biais cognitifs mais si l’IA reproduit le fonctionnement humain et l’amplifie pourrait-il augmenter ces biais ? Les premiers constats auraient tendance à nous faire penser que oui de par certains propos constatés par ChatGPT ou par les mensonges relevés. ChatGPT, menteur et misogyne ?

Peut-être quand on l’entraine… Car ChatGPT, à la manière de l’Homme parfois, n’aime pas ne pas avoir de réponses. Et sans réponse à donner, il est susceptible de les inventer. Alors quand on se bat contre l’IA ne nous battons-nous pas contre nous-même ? Car si on retire les défauts de l’entraineur, on peut percevoir un grand nombre de possibilités telles que la médecine prédictive, la médecine de prévention, l’aide à la décision, la chirurgie assistée ou encore le robot compagnon. Mais si de l’adversaire nous voulons faire de l’IA notre compagnon, il faudra prêter attention à ce que son utilisation soit validée par la recherche, que son coût financier et environnemental soit évalué et qu’il respecte les six grands principes établis par l’OMS comme la garantie de transparence, d’inclusion et d’équité.

You : et si c’était votre nouvel interne ?

Demain tous à Bali ? C’est peut-être ce qui arriverait si un jour You et ChatGPT pouvaient remplacer les médecins. Mais ne commencez pas déjà à faire vos valises, car même les principaux intéressés ne semblent pas convaincus d’en avoir les compétences. En effet, Mister ChatGPT nous prévient : c’est peu probable. Et quand on y pense, au regard des déserts médicaux qui ne pourraient pas être balayés par l’IA car représentent aussi des déserts numériques, mais aussi du besoin de former les usagers et de l’apport de l’IA au sein du binôme soignant-soigné, il est temps de poser définitivement sa valise. Pour évaluer les éventuelles compétences d’interne de l’IA, nos conférenciers finissent par un match en deux manches, deux situations cliniques pour lesquelles est demandée une proposition de diagnostic et de prise en charge. Quel résultat ? Un public qui majoritairement estime les réponses plutôt acceptables. Des seniors bienveillants qui semblent avoir choisi leur camp en ne faisant pas de leurs nouveaux internes You et ChatGPT des ennemis.

Alors l’IA, nouveau meilleur ennemi ou compagnon de route ? C’est à vous de choisir ! Et si vous ne savez pas vous pourrez toujours demander à votre avatar numérique

Auriane Gros
Nice