W. Drevetz (Tulsa) se demande si les progrès de l’imagerie cérébrale permettent de l’utiliser pour suivre le cours de la maladie. Idéalement, on devrait disposer de marqueurs prédictifs et pronostiques ainsi que d’indicateurs sur le stade évolutif. « Le taux de cholestérol permet bien de prédire un risque et de mesurer l’efficacité du traitement ».

L’imagerie chez le sujet âgé : démence et dépression

Y. Sheline (Philadelphie) s’est intéressée à l’imagerie dans les états démentiels. Une technique d’IRM fonctionnelle, le resting state (ou default mode), permet d’identifier dans l’ensemble du cerveau la connectivité au repos grâce à la répartition du signal bold (consommation d’oxygène) , et de mettre en évidence plusieurs années avant les symptômes cliniques, une évolution vers la maladie d’Alzheimer. De plus, les images identifient le dépôt progressif de substance amyloïde, un des mécanismes physiopathologiques probables de la maladie. On sait que chez les patients âgés, une dépression sans antécédent de trouble thymique peut être le prodrome d’une démence. Dans deux groupes de patients de plus de 60 ans souffrant d’un premier accès dépressif dont l’évolution a été longue ou brève, l’observation d’une moindre épaisseur du cortex cingulaire gauche et globalement d’un plus grand nombre d’hypersignaux sous corticaux, apparaît comme spécifique de l’évolution la plus longue, associée à un risque plus élevé de démence. L’imagerie est ici plus informative que les tests neuropsychologiques et la réponse au traitement antidépresseur, qui ne différencient pas les deux groupes.

Troubles de l’humeur : visualisation de l’inflammation locale, mesure de l’activité MAO.

Dans les troubles de l’humeur (Drevetz), si l’on déjoue les pièges des effets non spécifiques comme la modification de la structure corticale par les psychotropes (notamment le lithium) ou l’augmentation de la densité neuronale qui n’est parfois que la conséquence d’un accroissement du neuropile (protrusions cytoplasmiques et cellules gliales entre les neurones), on peut s’intéresser au rôle des cellules gliales (marquées par l’acide quinolinique, agoniste NMDA) dans l’inflammation , mécanisme immunitaire de la dépression . Les cellules gliales, sentinelles du système immunitaire, dans le cerveau interviennent en effet dans l’inflammation et son contrôle par les glucocorticoïdes et les cytokines anti-inflammatoires. Dans le cas particulier des dépressions saisonnières, un examen PET à l’aide de l’harmine, IMAO végétal marqué par un traceur radioactif, fournit un indice de l’activité MAO dans le cortex préfrontal et le cingulum, prédisant une réponse thérapeutique à un traitement IMAO.

L’informatisation des big data

Si une imagerie relativement simple peut s’avérer utile, la qualité des marqueurs résulte surtout de modélisations mathématiques (C. Carter, Davis, California) : l’addition d’un algorithme de classement d’images d’IRM fonctionnelle pendant une tâche cognitive (Continuous Performance Task) permet d’identifier les patients schizophrènes désorganisés mieux qu’en analysant les résultats à cette tâche, et en imagerie structurelle de différencier la schizophrénie de la bipolarité dans 88 % des cas. Le logiciel tient compte de la distribution de la substance grise dans l’ensemble du cortex. FX Castellanos (NY) rappelle enfin que les images de resting state permettent de cartographier les réseaux fonctionnels des différentes pathologies, ou mieux des dimensions transnosographiques (selon les Research Domain Criteria ), grâce au pouvoir statistique des grandes populations de patients (les Big Data ou datamasse), qui supposent la collaboration d’équipes nombreuses, comme dans le projet Human Connectome aux Etats-Unis, qui cartographie l’ensemble de la substance blanche. La gestion de ces données volumineuses échappe à l’homme pour être confiée aux machines, favorisant les études exploratoires au détriment des études guidées par une hypothèse qui dépendait jusqu’à présent de l’inventivité des chercheurs.