CFP2022

C3- Clinique des Expériences Exceptionnelles.

Qui ne se souvient pas de cette émission qui mettait du paranormal dans notre quotidien dans les années 90 ? Passage d’OVNIs dans le jardin, enlèvement extraterrestre, « maison qui saigne », discussion avec des proches disparus. La paranormalité nous attirait devant nos petits écrans et faisait partie de nos vies. A travers films et séries, ce paranormal, devenu normal dans les fictions, réussit toujours à rassembler. Dead Zone, Medium, Heroes, Supernatural, etc… Autant de fictions qui, au fil des années, ont saupoudré nos soirées de paranormalité. Mais est-ce vraiment de la simple fiction ? N’y a-t-il pas une réalité clinique derrière ces personnages qui sauraient lire dans nos esprits ou prévoir notre futur ?

Tous médiums

Si vous réfléchissez bien, vous êtes peut-être une des personnes sur deux a déjà avoir vécu une expérience exceptionnelle. Mais qu’entend-on par une expérience exceptionnelle ? Une expérience exceptionnelle, ou « vécue » comme « paranormale », va impliquer une interaction non ordinaire avec son environnement, engendrer des émotions souvent intenses, et ne pas coller avec notre modèle de la réalité.

Elle peut se découper en trois polarités. Le pôle projectif comprend les personnes qui pensent pouvoir guérir par la pensée dont les magnétiseurs et les mediums. Et attention ils sont partout parmi nous puisqu’ils seraient deux fois plus nombreux que les psychologues cliniciens !

Le pôle de la perception psi comprend la clairvoyance ainsi que la télépathie avec une fréquence de 50 % pour cette dernière. Et si on y pense, quand j’ai pensé à X hier et qu’elle m’a appelé(e), n’était-ce pas un pouvoir de télépathie ? Hasard, pouvoir, ou encore simple compétence cognitive d’appréhension des faits, tout cela dépend de l’interprétation que l‘on en fait. Je me suis fait passer pour un voyant et ça a fonctionné ! Le rêve prémonitoire fait également partie de ces types d’expériences qui peuvent, selon l’interprétation de celui qui le vit, témoigner d’un aspect paranormal. Serions-nous donc plus de la moitié a avoir déjà vécu une expérience exceptionnelle mais sans l’interpréter comme paranormal ? Mystère !

Je deviens fou !

Le dernier pôle, le pôle perceptif, est celui qui entretient le lien le plus étroit avec la psychopathologie. Ce pôle regroupe les expériences comprenant la sensation d’être en contact avec deux mondes et avec le divin. Expérience de mort imminente, de réincarnation, d’abduction, toutes ces expériences peuvent avoir été sources d’un traumatisme ou sa conséquence.

De plus, du fait de la relation complexe entre psychopathologie et expériences exceptionnelles, le vécu paranormal peut souvent être source de souffrance psychique intense. Comment en parler à son psychiatre sans être terrorisé d’être perçu comme un fou ? Sentiment de honte, peur intense de la folie ou de l’impression de folie, Thomas Rabeyron rappelle que le clinicien doit être rassurant pour ouvrir le dialogue et surtout qu’avoir une expérience exceptionnelle ne signifie pas entrer dans la psychose. En revanche, la recherche nous apprend que le vécu paranormal peut dévoiler un vécu traumatique enfoui. Les travaux de Mc Nally et John Mack nous ont ainsi appris à suspecter un traumatisme de type abus sexuel en cas de vécu d’abduction rapporté. L’étude multicentrique Aware a permis de repérer et d’accompagner les expériences de mort imminente suite aux arrêts cardiaques. Enfin, les neurosciences ont aussi apporté leurs clefs de compréhension, notamment sur les expériences de sorties du corps qui seraient liées à un défaut d’intégration par le Gyrus Angulaire Droit.

CIRCEE

Circé, au-delà d’être un personnage mythologique, est également le nom donné au Centre d’Information, de Recherche et de Consultations des Expériences Exceptionnelles créé par Thomas Rabeyron et ses collaborateurs. Réaliser que sa main bouge seule pour écrire des symboles étranges, voir des formes de vies étrangères à côté de son lit, sentir la mort, sont autant d’expériences, au-delà d’exceptionnelles, potentiellement traumatisantes pour un cerveau Bayesien tel que le nôtre. Cette effraction dans notre réalité et dans nos prédictions établies, peuvent représenter pour certains de véritables chocs. Et, dans la grande majorité des cas, cela ne traduit pas une pathologie ou le risque d’en développer une.

En revanche, Thomas Rabeyron nous présente un modèle de compréhension mettant en évidence, à la manière d’un cercle magique, les traits de personnalité, perméabilité psychique et tendance à l’imaginaire, et les facteurs prédisposants, traumatismes et transmission familiale. Avec cette compréhension et la prise de conscience que la population ciblée est une population souvent hors-circuit, que le diagnostic différentiel est complexe et de l’importance de la prise en compte de la culture et de la clinique du trauma, les séances peuvent ainsi faire part à un cercle de protection. La position d’incertitude, d’indécidabilité, est le centre de ce cercle sacré dans lequel le thérapeute est là pour accueillir sans juger, sans décider du vrai du faux et surtout en gardant une bonne dose de recul.

Et si vivre des expériences exceptionnelles était une nécessité de désorganisation pour réorganiser notre esprit ? Si les générer en restant prisonnier sept jours dans une statue ou en regardant des stroboscopes dans un caisson insonorisé représentait un potentiel thérapeutique dans la dépression ? Ça vous parait fou mais cela pourrait juste être du paranormal !