Edito – Journée de l’ACCompagnement et de l’action médico-sociale (JACC 2021)

Après Max Weber et Martin Heidegger, Hartmut Rosa prolonge la tradition allemande d’une réflexion sur la modernité et la place occupée par la technique dans les sociétés humaines. D’après lui, l’accès toujours plus grand à des ressources comme les moyens de transport, de communication, de connaissance n’a pas rassuré l’homme dans son désir de contrôle et de mise à disponibilité du monde. Au contraire, jamais nous n’avons semblé aussi préoccupés par notre manque de temps, notre incapacité à vivre vraiment les choses, toujours tendus vers le besoin de plus, plus vite, avec le moins d’obstacles possibles. Au détachement provoqué par cette accélération, à la dévitalisation des liens, il propose de ne pas répondre par le seul ralentissement mais par la résonance, cette forme d’être-en-lien qui écoute et ressent, est affecté, touché, ouvre à du possible, de l’improvisé, du non paramétrable.

La réflexion d’ H. Rosa est au coeur d’une intervention de la Journée de l’ACCompagnement et du médico-social (JACC1C) . Les réponses qu’il apporte à l’accélération productiviste de nos existences, aux formes modernes de l’aliénation sociale, font écho aux questions de résonances qui sont à l’oeuvre dans tout le travail d’accompagnement et de réhabilitation.

Pair et lien

Chaque intervention de la journée se dispose en pétale autour de ce coeur, de ce noyau de résonance qui aide à établir une relation de soin, à rétablir une relation de vie sociale avec des moyens à inventer. L’autostigmatisation, processus par lequel la personne peut déconsidérer son statut du fait de son trouble, est un élément important de la fragilisation d’existence sur lequel on peut agir (JACC1A) et qui nous impose une réflexion sur la représentation de la maladie et des soins véhiculée par les soignants eux-mêmes.

Le travail de soutien par les pairs en est un autre, concret, qui ne promeut pas seulement le lien mais le développe, crée des opportunités de vie sociale, comme les groupes d’entraide mutuelle ou les “clubhouse” dont on assiste au développement dans toute la France (JACC1D).

Tous sous la toile

La recherche sur les effets des soins s’est ouverte à une exploration méthodique des vécus et des appréciations des soins par les patients eux mêmes (JACC1B). On en aura une illustration par l’analyse qualitative d’un programme de suivi socio-sanitaire orienté vers le rétablissement pour des patients schizophrènes, appuyé sur des projets où l’implication de la personne, la prise de décision partagée illustrent l’importance accordée à la résonance entre les parties (JACC2B).

Enfin la logique et la pratique du réseau, du maillage des partenaires constitue le véritable enjeu collectif à tous les niveaux de l’accompagnement (JACC2A, JACC2C), y compris l’insertion professionnelle (JACC2D).

Un programme en forme de fleur que chacun peut venir butiner pour revenir à sa ruche institutionnelle chargé d’un miel nourrissant la vie de tous les dispositifs concernés par ce travail minutieux, discret, rhizomatique, généreux, essentiel.