Édito – Addictions CFP2021

Le thème Connexions du CFP 2021 a été choisi pour illustrer notamment l’enrichissement de la Psychiatrie par l’apport d’autres champs de réflexion et de recherche. Ce qui est vrai pour la Psychiatrie l’est encore plus pour l’Addictologie. Celle-ci est par nature bio-psycho-sociale, à l’intersection de plusieurs disciplines médicales, de la neurobiologie, de la psychologie et des sciences sociales. Ces aspects « hyper-connectés » seront discutés dans un symposium « French connexions » (S17), en particulier les relations Addictologie/Neurologie/Psychiatrie/Santé Publique. Du fait de ces connexions multiples, l’Addictologie est aussi une discipline qui suscite beaucoup de débats : pas moins de quatre cette année au CFP.

Les points forts

  • Pathologies addictives et psychiatriques sont tellement intriquées qu’il est nécessaire de rechercher systématiquement les comorbidités.
  • Les objectifs, d’arrêt total ou de consommation contrôlée de substances, sont partagés avec le patient.
  • Les téléconsultations addictologiques, qui se sont imposées durant le confinement, prennent de plus en plus d’ampleur.

Le premier débat, sur les pathologie duelles, est provocateur.

Les pathologies duelles, psychiatriques et addictologiques, sont définies par le fait que leur co-occurrence ne peut pas être le fruit du hasard. D’autres auteurs soutiennent une relative indépendance entre les deux troubles. Dès lors s’affrontent plusieurs conceptions du soin : d’un côté, chacun chez soi, d’où l’attitude : « c’est un malade pour vous ou un malade pour nous ? ». De l’autre, les partisans d’une approche processuelle intégrant les facteurs partagés, neurocognitifs, émotionnels, neurodéveloppementaux, génétiques et environnementaux. Alors, que faire ? Connecter ou déconnecter ? C’est l’objet du débat « Pathologie duelle : l’œuf OU la poule vs. l’œuf ET la poule » (D04).

 Le second débat est un grand classique.

Quel objectif pour les patients présentant une (des) addiction (s) : Arrêter totalement ou consommer « raisonnablement » ? L’objectif d’arrêt total et définitif est lié à la notion de modifications cérébrales définitives induit par la dépendance à l’alcool ou une drogue qui rendent illusoire la maitrise de comportements dont la nature ne peut être qu’excessive. Néanmoins, certaines études épidémiologiques et cliniques ont retrouvé qu’un certain nombre de patients pouvaient parfaitement arriver à une consommation contrôlée. Le débat arrivera t’il à surmonter cette dichotomie ? Les progrès thérapeutiques liés au développement des approches motivationnelles qui s’appuient sur les ressources propres des patients peuvent-ils aller dans ce sens « Abstinence totale vs. consommation contrôlée » (D05) ?

Le troisième débat est étonnant.

Comme beaucoup d’autres sports, la pratique du surf a des effets bénéfiques pour la santé. Elle peut être aussi être excessive et nocive pour la santé lorsqu’elle prend toute la place dans la vie d’un sujet à l’instar d’autres comportements problématiques tels que le jeu, les achats. On retrouve là la controverse classique du pharmakon, à la fois remède et poison, observée avec les substances pouvant entraîner une addiction. Alors, l’addiction au surf ou le surf comme moyen thérapeutique (« Surf et addictions : plonger ou sortir la tête de l’eau ? » (D07) ?

Le quatrième débat est intriguant.

Ce débat porte sur le développement et l’intérêt des téléconsultations durant le confinement lié au Covid-19, mais aussi les risques liés aux nouvelles technologies. Naturel chez les plus jeunes, le recours massif au numérique lors du confinement a été facilement accepté par tous, ce qui remet en cause les consultations traditionnelles en face à face. Dès lors, se posent de nouvelles questions : qu’est ce que le numérique apporte à la relation médecin-malade et qu’est ce que cela lui retire ? Tels sont les enjeux de ce débat « Y a-t-il un transfert dans la connexion ? » (D08).

Les écrans : au cœur des connexions.

Les écrans sont maintenant partout dans nos vies. Les addictions aux écrans se sont aussi répandues, mais encore mal connues. Ce sera l’objet d’une communication « Trop connectés ? Les addictions derrière les écrans » lors du Symposium du Comité Jeunes Psychiatres « connexion ou déconnexion ? » (S11). Les Jeux d’argent sont également de plus en plus présents sur Internet, d’où l’importance d’une prévention des jeux problématiques en amont pour limiter les risques de rechute chez des personnes en rémission d’une addiction. C’est l’objet d’un symposium sur les jeux d’argent « innover pour une prévention des risques addictifs basée sur les preuves », avec en particulier des communications sur les « stratégies marketing digitales des opérateurs de Jeux de hasard et d’argent » et sur le développement de pictogrammes pour augmenter les compétences à évaluer l’addictivité des jeux d’argent et de hasard qui s’annoncent passionnantes (S03).

Les autres connexions ?

D’autres connexions vont être explorées entre Addictologie et Psychiatrie de l’enfant et adolescent : « le Trouble du Spectre de l’Autisme et les jeux-vidéo : intérêts restreints ou addiction ? » (R13), avec la Psychiatrie de la personne âgée « alcool, cerveau et vieillissement : démence sans modération ? » (R05) et avec la Psychologie « Personnalités dysfonctionnelles et conduites addictives » (FA19).